Dossier extrait du livre collectif
"Les réseaux Action de la France combattante, 1940-1944"
publié en 1986 par l'Amicale des Réseaux Action de la France Combattante
En 1937, un jeune élève-pilote qui s'entraînait pour passer son brevet de tourisme, s'intéressait vivement, et c'était bien naturel, à l'histoire de l'aviation. Un récit attira avec force son attention ; il le lut et le relut, et ces lignes ne quittèrent plus sa mémoire.
Il venait d'apprendre que, pendant la Première Guerre mondiale, un courageux pilote français allait se poser dans les prés, derrière les lignes allemandes, pour y déposer des espions. Cela lui parut d'une telle audace, qu'il se demanda comment l'on avait pu avoir l'idée de tenter d'aussi périlleuses aventures, et comment celles-ci avaient bien pu réussir.
Il ignorait alors que, quelques années plus tard, il aurait précisément pour mission, avec d'autres, d'organiser de telles opérations. Cet homme s'appelait Henri Guillermin et pour nous il fut Pacha. Il nous a quittés en 1984.
Sommaire de ce dossier :
Dès la fin de 1940, quelques agents furent parachutés, soit pour rechercher des renseignements, soit pour opérer des coups de main précis sur des objectifs allemands. Ces opérations étaient appelées « blind », c'est-à-dire « aveugles », car les parachutistes sautaient au-dessus de la campagne, dans un endroit supposé désert, sans y être attendus par un « comité de réception », pour les recueillir, les cacher et les orienter.
Ils espéraient d'abord ne pas tomber sur une clôture de champ ou dans un arbre… Arrivés au sol, leur premier soin était de récupérer leur « paquet », contenant outre leurs effets personnels, des armes, des explosifs, ou encore un poste émetteur-récepteur, paquet qui avait été largué en même temps qu'eux… ou presque, et qu'ils retrouvaient à quelques dizaines de mètres, à plusieurs centaines de mètres, ou parfois pas du tout.
Avec leur petite pelle pliante, ils devaient creuser un trou pour enterrer les parachutes et les combinaisons. Ils camouflaient ensuite l'endroit de leur mieux, en découpant par exemple dans le pré des carrés d'herbes qu'ils plaçaient sur la terre tassée par leurs pieds. Puis, ils partaient à l'aventure, cherchant d'abord à bien savoir où ils se trouvaient. Ils avançaient à la recherche d'une route ou d'un hameau, à la découverte d'un panneau indicateur ou d'une borne. Comme ils étaient munis d'une carte de la région sur laquelle ils devaient être lâchés, ils étaient alors en mesure de faire le point, et de décider où et comment s'insérer dans la population, sans se faire remarquer, et trouver un moyen de transport pour rejoindre leur destination.
Neuf missions Action furent ainsi parachutées en 1941. Les responsables de ces missions avaient été instruits de la possibilité d'opérations de parachutage de matériels, et connaissaient leurs conditions d'exécution. Ils pouvaient déjà trouver dans les premiers éléments des mouvements de résistance de petits groupes actifs et décidés pour leur prêter main-forte et utiliser ces matériels.
Très vite, des terrains furent proposés pour des parachutages, avec la présence de ces groupes d'hommes pour en assurer la réception, le transport et l'exploitation. Peu de ces terrains se révélèrent utilisables, car ils ne remplissaient pas les conditions nécessaires à la sécurité exigée, à l'évacuation sans trop de risques du matériel reçu, et à son camouflage provisoire. La RAF, de son côté, refusa la plupart des lieux choisis, pour de multiples raisons : zones de défense aérienne allemande ou vichyste rendant l'approche du terrain difficile, éloignement trop grand de la base de départ des bombardiers, absence de points de repère visibles par clair de lune, tels que rivière, ligne de chemin de fer etc. Pour une raison ou une autre, la RAF présumait alors que l'avion ne repérerait pas le terrain, ou encore que le relief des environs immédiats ne permettrait pas une descente à base altitude pour le largage.
Certains terrains furent néanmoins retenus, et des opérations y furent tentées. Elles se soldèrent la plupart du temps par des échecs. Souvent les équipages ne détectaient pas le terrain dont les coordonnées avaient été mal transmises ou mal interprétées, parfois le balisage n'était pas conforme, ou était allumé trop tôt ou trop tard, ou encore la lettre de reconnaissance en signaux morse lumineux n'était pas émise ou mal émise. Chacune de ces anomalies pouvait signifier que l'ennemi avait neutralisé l'équipe de réception et avait pris sa place, ce qui amenait l'avion à repartir sans larguer ses parachutes.
Cela fut trop souvent le cas et les équipages ne cachaient pas leur mécontentement, faisant à leur retour des comptes rendus fort critiques ; en effet, un bombardier naviguant seul pendant des heures, sans accompagnement de chasseur au-dessus d'un territoire contrôlé par l'ennemi, courait des risques réels d'être abattu, et au moins fallait-il que ces risques soient compensés par des résultats suffisants.
Les parachutages de matériels destinés à la Résistance furent suspendus, et les Anglais n'acceptèrent de les reprendre que lorsque des officiers formés au cours de stages en Angleterre et brevetés par la RAF pour les parachutages et atterrissages, seraient infiltrés en France et dotés des moyens radios nécessaires, pour y prendre la responsabilité de toutes les opérations aériennes.
Outre les entraînements communs à tous les agents envoyés en France, sécurité, codage et décodage, saut en parachute etc., la formation des officiers spécialisés pour les opérations aériennes comportait deux stages, l'un appelé « Eurêka S-Phone », du nom des deux appareils de radio utilisés pour le guidage des bombardiers, et qui portait sur les parachutages, et l'autre appelé « Hudson-Lysander », du nom des deux avions utilisés par la RAF pour les atterrissages. Les stagiaires apprenaient l'ensemble des sévères conditions techniques à remplir pour réussir d'aussi délicates opérations, et passaient ensuite à la pratique, en effectuant dans la campagne anglaise des parachutages et atterrissages, qui n'étaient pas très clandestins, mais représentaient tout de même une bonne illustration de l'enseignement reçu.
En zone Sud : le SOAM
Les officiers de liaison mis en place par Jean Moulin auprès des mouvements de résistance réalisent enfin dès les premiers mois de 1942 des parachutages, rares encore, mais avec un pourcentage de succès suffisant pour que la RAF ne rechigne plus à l'envol de ses avions. Et Sif réussit son premier atterrissage près de Lons-le-Saunier.
L'ampleur et l'importance des missions dévolues à ces premiers officiers de liaison les amènent à mettre en place et sous leur coupe directe une véritable petite organisation, indépendante des mouvements au profit desquels ils agissent : adjoints, secrétaires, boîtes aux lettres, agents de liaison, et évidemment, équipes de balisage, réception, protection des terrains. Ces personnels sont recrutés à l'intérieur des mouvements de résistance dans la plupart des cas, et cela ne va pas sans provoquer des difficultés.
La création d'un service spécialisé s'impose à Jean Moulin, et dès novembre 1942, il crée le SOAM, Service des Opérations Aériennes et Maritimes, au moment même où s'unissent au sein des MUR, Mouvements Unis de Résistance, les mouvements Combat, Libération et Franc-Tireur.
En zone Nord et Ouest : le BOA
L'organisation d'opérations aériennes dans cette zone, où la présence ennemie était beaucoup plus dense, se révéla plus délicate et plus lente.
La mise en place de structures comparables à celles qui avaient été décidées pour la zone Sud, fut l'un des premiers objectifs de Jean Moulin, lorsqu'en novembre 1942, l'armée allemande occupant désormais tout le territoire national, il étendit son action au pays tout entier. Et au SOAM de la zone Sud, va correspondre, avec ses particularités et compte-tenu du tracé de la zone Nord et Ouest, le BOA, Bureau des Opérations Aériennes. Il faut aussi signaler, pour ce qui est de cette zone Nord et Ouest la mission Mab et le réseau Sol.
En fin 1942, le BCRA avait acheminé en Bretagne dans la région de Pontivy-Ploermel, une mission dirigée par Mab (Cholet) avec son radio Mab W (Papin) pour organiser des parachutages. Les premières opérations eurent lieu en janvier 1943. Cependant cette mission, très limitée géographiquement, devait se mettre en sommeil en juillet 1943 avant d'être rattachée au BOA en octobre de la même année.
En été 1942, le réseau de renseignements Ali crée une branche « Action » dirigée par Tir (Tavian) qui organise dans le département de la Loire un groupe commandé par Bornier et Nottin et appelé Sol. Il réalise plusieurs parachutages dans la région. Eugène Bornier, ayant pris fortuitement contact avec un étudiant en médecine de Bordeaux (Lapeyre-Mensignac) qui, de sa propre initiative, avait organisé une chaîne d'évasion, il le charge de monter un sous-réseau Sol Sud-Ouest qui réussit rapidement des opérations de parachutage et d'atterrissage.
L'organisation de la Loire sera bientôt démantelée par la Gestapo. Sol Sud-Ouest constituera, par la suite, la base du BOA de la région B.
Le SOAM devient COPA
Au printemps 1943, les trois officiers d'opérations de la zone Sud sont complètement « brûlés ». A la suite de nombreuses arrestations, la Gestapo, par la saisie de documents connaît l'organisation du SOAM. Il faut faire du neuf pour éviter le démantèlement total. Heureusement Londres envoie trois nouveaux officiers : Luc (Larat) qui doit prendre le relais de Sif et Arthur (Rateau) sont parachutés en mars. Pair (Grout de Beaufort) arrive à la lune d'avril.
Kim a rejoint la zone Nord le 15 mars. Frit est arrêté le 4 avril et sera déporté. Sif, qui supervise toute la zone Sud, ne rejoindra Londres que le 15 juin après avoir mis Luc au courant de l'organisation ; il sera arrêté au cours d'une autre mission et ne reviendra pas de déportation.
En avril, par mesure de sécurité le SOAM change de nom et devient COPA (Centre d'Opération de Parachutage et d'Atterrissage) mais il garde les mêmes structures, avec la répartition suivante des postes dans les régions de l'Armée Secrète (anciennes régions Combat), dont la carte figure dans le chapitre sur les Délégués Militaires :
Le COPA devient SAP
Le 21 juin 1943, six jours seulement après le départ de Sif par atterrissage, Luc est arrêté avec Jean Moulin à Caluire. La Gestapo découvre son PC et sa boîte aux lettres et s'empare de documents.
Les régions 1 et 2 sont décapitées. Un adjoint de Sif parti à Londres avec lui suivre les stages est parachuté dès juillet pour reprendre en main le réseau sous le pseudo de Galvani, Rivière.
Toujours par mesure de sécurité le COPA devient la SAP (Section des Atterrissages et des Parachutages). Ce nom restera valable jusqu'à la fin des activités.
Renforcement de l'implantation
Il est bien évident que les officiers d'opérations sont des gibiers de choix pour la Gestapo qui les recherche très activement. Elle fait maintenant des ravages importants. Quelques arrestations peuvent avoir des conséquences tragiques en stoppant les opérations au moment où la Résistance a, pour ses actions qui se précisent, des besoins de plus en plus importants en armes et en explosifs.
Aussi le BCRA décide-t-il en août 1943 de décentraliser davantage l'organisation, pour limiter les dégâts occasionnés par la police allemande, et de doter, dès que possible chaque région d'un responsable qui prendra le titre d'« Officier Régional d'Opérations ». Cette mise en place se fera progressivement au fur et à mesure que des officiers brevetés seront disponibles pour être infiltrés en France.
Le tableau ci-après essaie de retracer l'évolution de l'organisation des opérations aériennes en zone Nord comme en zone Sud. Il montre combien étaient grands les risques encourus par les responsables. Sur les dix-neuf officiers arrêtés, quatre se suicident pour ne pas parler, cinq sont fusillés ou abattus, trois meurent sous les tortures ou en déportation, cinq seulement reviennent des camps et deux s'évadent après leur arrestation.
Lorsque Jean Moulin créa le SOAM, en novembre 1942, il désirait superviser personnellement ce service car la répartition des armes ne pouvait qu'affirmer son autorité. Il nomma donc un chef national pour la zone Sud, et choisit tout naturellement l'officier d'opérations qui, comme lui, avait son PC à Lyon et qui, en outre, était le plus ancien, c'est-à-dire Sif.
Le chef national devenait, pour les opérations aériennes, le seul interlocuteur de Rex, de qui il recevait les instructions. Il les transmettait aux autres officiers d'opérations. Ces derniers lui rendaient compte et lui étaient hiérarchiquement subordonnés.
Lorsque le BOA fut constitué en zone Nord, en avril 1943, Rex agit de même et nomma Pal, son envoyé, chef national pour le Nord.
Après l'arrestation de Jean Moulin, le BCRA reconsidéra la question en avril 1943, dans le cadre de la décentralisation, et les chefs nationaux devinrent bientôt des coordinateurs, qui devaient conseiller, informer et dépanner les autres officiers régionaux.
En fin d'année 1943, le Bureau des Opérations du BCRA ne se montrait guère partisan de cette prééminence quand elle n'était pas contredite formellement. Mais finalement, elle fut, plus ou moins, maintenue, car elle pouvait avoir son utilité. En effet, un officier régional d'opérations pouvait être arrêté, sans que son organisation soit complètement anéantie. Le coordinateur pouvait alors désigner un adjoint comme chef intérimaire en attendant l'arrivée d'un nouvel officier breveté. Chaque mois, les régions devaient faire parvenir un courrier à Londres exposant leurs problèmes, leurs activités, leurs réussites et leurs échecs, sans qu'un atterrissage soit effectué dans chacune d'elle. Ces courriers pouvaient alors être transmis au coordinateur qui assurait leur acheminement par une opération réalisée dans une région plus favorable géographiquement. Par exemple R1, avec l'immense plaine de l'Ain, allant de la Saône au Jura, disposait de plusieurs terrains d'atterrissage.
D'autres problèmes pouvaient encore être plus facilement résolus par la coordination : dépannage pour la transmission de câbles en cas d'arrestation de radios, priorité des départs de France etc. Il n'était d'ailleurs pas question de hiérarchie entre les chefs de région. Ils restaient avant tout camarades de combat. Puis, lorsque, à partir de septembre 1943, les DMR (Délégués Militaires Régionaux) furent progressivement mis en place, les instructions du BCRA précisèrent que « l'officier régional d'opérations travaille en étroite liaison avec l'officier délégué militaire de région et lui est hiérarchiquement subordonné ». Mais, là aussi, les relations étaient surtout empreintes de cette solidarité qu'éprouvent des compagnons bravant ensemble de nombreux dangers.
Zone Sud
— Luc (Larat) arrêté le 21.6.43 mort en déportation. fdklgj dksjgfjkdsjf jkjs fjklj dskfjlk sjfjkl jfflksdf
— Galvani (Rivière) à partir de juillet 1943.
— Sultan (Picard) de décembre 1943 à mars 1944.
— Nonce (Jolivet de Riancourt) à partir de mars 1944.
— Sultan (Picard) de décembre 43 à avril 44 — devient DMR R3.
— Pacha (Guillermin) à partir d'avril 1944.
— Baron (Hennebert) à partir de janvier 1944 — Arrêté par la Gestapo, s'évade et reprend son poste.
— Evêque (Léger) tué par la Milice le 27.5.44.
— Député (Ulmer) à partir de juin 1944.
Chefs nationaux et Coordinateurs de zone : Sif (Fassin) puis Lue (Larat) puis Marquis (Rivière)
Zone Nord.
Région A :
Région B :
En région B, les opérations sont suspendues de février à juillet-août 1944
Région C :
Région D :
Région M :
Région P — Kim (Schmidt) avec région M jusqu'en septembre 1943
Chefs nationaux et Coordinateurs de zone : Pair (Grout de Beaufort) puis Kim (Schmidt) puis Gauss ex Bel (Pichard)
L'Officier régional d'opérations
Chaque officier régional d'opérations organise son réseau comme il l'entend. En principe, il s'entoure d'adjoints, parfois parachutés, pour la répartition des tâches et pour le maintien de l'activité malgré les arrestations ; par exemple : un adjoint principal, un adjoint pour les transports d'armes, un adjoint chargé du matériel, etc.
Un secrétariat s'occupe du codage et du décodage des câbles, de la mise à jour du fichier des terrains, de la frappe des rapports mensuels pour le BCRA ou des notes et instructions destinées aux divers agents, de la tenue des archives, certes réduites au minimum mais indispensables, etc. Il est installé dans un PC secret dont l'adresse n'est connue en principe que du chef d'opérations et de ses adjoints.
Un service social veille aux aides à apporter aux familles des tués et des déportés, dispose d'asiles de rechange pour les agents obligés de quitter immédiatement leur logement ou pour les aviateurs alliés descendus et récupérés pour leur rapatriement.
Si la région est vaste, quelquefois dix départements, l'officier régional peut nommer des chefs de sous-région pour une organisation plus efficace et plus rapide dans ses liaisons. Des chefs départementaux, éléments fondamentaux, recherchent des terrains et les caches d'armes, nomment les responsables des équipes de réception des parachutages auxquels ils assistent personnellement avec la responsabilité pratique des opérations.
Des courriers assurent le transport des plis, aux différents agents de la région, et éventuellement aux patrons des autres régions. Continuellement en voyage, ils doivent déjouer tous les contrôles de la circulation, fréquents et sévères, et faire en sorte que même fouillés on ne découvre pas l'enveloppe qu'ils acheminent. Ils sont recrutés parmi les personnes les moins suspectes : jeunes filles, femmes, hommes âgés.
Un chef radio assume la responsabilité du fonctionnement de la chaîne. Celle-ci dispose d'au moins deux opérateurs-émetteurs sur Londres et pour les régions du Sud, un sur Alger. En plus, un radio-récepteur dit « Broadcast » capte les câbles émis par Londres. D'autres agents recherchent les lieux d'émission (il faut en changer chaque jour pour éviter le repérage gonio), mettent en place les postes émetteurs et assurent la protection des radio-émetteurs. Parfois, un technicien est chargé de l'entretien et de la réparation du matériel. Enfin, des courriers acheminent les câbles codés sur les lieux d'émission et vice versa.
L'officier régional d'opérations peut prendre l'initiative de créer des services chargés d'activités annexes comme une chaîne d'évasion par l'Espagne, la recherche des aviateurs alliés descendus, etc. En outre, si son rôle ne consiste pas en la recherche du renseignement, il ne manquera pas de communiquer au BCRA toute information valable qui arrive à sa connaissance. Plusieurs dizaines d'agents donnent leur activité à plein temps au réseau et doivent donc être rétribués. Il leur est demandé d'ailleurs de souscrire un engagement dans les FFC. Une fois rédigé, l'acte est déchiré en deux : une partie est envoyée par prochain courrier au BCRA, l'autre leur est remise avec consigne de la camoufler dans une cachette à toute épreuve. Le pseudo administratif qui leur est attribué, appelé aussi nom-code, et qui n'a rien à voir avec le pseudo de travail dans la clandestinité, est celui de l'officier d'opérations suivi d'un numéro d'ordre, par exemple : Sif I, Sif II, Sif III, etc.
Si on prend en compte les chefs de terrain, qui sont eux des agents occasionnels, le réseau comprend plusieurs centaines de personnes. Les membres des équipes de réception représentent des milliers d'hommes. La plupart du temps, ils sont fournis par les mouvements puis par l'Armée Secrète.
Dans certaines régions des accords étaient passés entre l'officier régional d'opérations et le chef régional de l'AS puis des FFI, pour que des éléments soient mobilisés sur place à la disposition des chefs de terrain. Il est vrai qu'à cette époque, après le débarquement du 6 juin 1944, les volontaires ne manquaient pas.
L'équipe régionale
L'officier régional d'opérations, seul, n'aurait rien pu faire. Le travail a été celui d'une équipe bien soudée et dévouée.
Que ces collaborateurs aient été parachutés ou recrutés sur place, tous prirent très vite un esprit de corps admirable, bravant tous les dangers pour la bonne marche du service, avec une nette conscience de leur responsabilité. Ce n'est pas parce qu'ils étaient plus nombreux, qu'ils avaient moins de mérite que l'officier régional.
Le tableau ci-dessus ne mentionne que le responsable du bloc ou de la région, et ne peut pas faire l'inventaire de tous les dévouements, d'ailleurs bien difficile à établir de façon précise maintenant.
L'équipe a vu certains de ses membres fusillés, d'autres tués, ou morts sous les tortures, d'autres encore éprouvés par les souffrances dans les effroyables camps de concentration. Les vides creusés dans leurs rangs ne les détournaient pas de leur devoir mais leur donnaient encore plus de courage. Aussi les survivants ont-ils noués entre eux, en souvenir de leur épopée une amitié si profonde que rien ne peut l'altérer.